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Depuis la controverse aux résonances internationales que l’« Affaire Louise Labé » a suscitée au début du siècle, et depuis la mise au programme des Œuvres aux concours des agrégations des Lettres (d’abord en 2005 puis plus récemment, en 2024), jamais on n’aura autant entendu parler de la « Belle Cordière ». L’intérêt critique pour cette voix féminine de la Renaissance ne cesse d’être ravivé. Aussi semble-t-il naturel de lui réserver une place parmi les « figures incontournables qui résonnent avec notre temps », avec ce petit volume de la collection « Destins » qui entend proposer une nouvelle biographie de la poétesse. L’ambition de cette collection, qui s’intéresse aussi bien à Cicéron qu’à Coco Chanel, est de rendre accessibles des personnages qui ont, à leur manière, marqué l’Histoire. Les ouvrages sont élaborés par des universitaires, spécialistes des domaines concernés, afin de dresser des portraits nourris des derniers apports de la recherche. Élise Rajchenbach, maîtresse de conférences à l’Université Jean-Monnet Saint-Étienne, et par ailleurs éditrice des Rymes de Pernette du Guillet, s’empare du « mystère Louise Labé », tout aguerrie qu’elle est à la question de l’écriture féminine au xvie siècle. Précisons tout de même que, contrairement à ce que son sous-titre pourrait suggérer, l’objectif du livre n’est pas d’examiner une poétique : dans une biographie synthétique, qui s’appuie sur toutes sortes de documents d’archives, Élise Rajchenbach veut peindre un contexte et y retracer le destin singulier d’une femme de la Renaissance devenue poète. Un mystère, des archives et des blancs En suivant la ligne éditoriale de la collection, l’ouvrage se présente comme une enquête biographique, ou plus précisément comme une synthèse des diverses recherches biographiques menées jusqu’à présent. Le problème, c’est que la vie de Louise Labé est finalement trop peu connue pour ne pas avoir laissé place aux conjectures, aux hypothèses voire à l’imagination. La spécialiste avertit : la « distance temporelle » impose de prendre « des précautions infinies afin d’évaluer posément ce qui a déjà été conté et écrit » (p. 9). Louise Labé, une gageure pour la biographe ? Étonnamment, Élise Rajchenbach ne revient pas sur la polémique suscitée par la thèse de Mireille Huchon selon laquelle Louise Labé serait une imposture poétique à laquelle on a tort d’attribuer la maternité des Œuvres de Louise Labé Lyonnaise1. L’apposition qui entame la quatrième de couverture (« Qui est↧