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3 « nanas » ou la plume savante à l’épreuve du genre (Tiphaine Samoyault, Nathalie Piégay, Laure Murat)

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3 « nanas » ou la plume savante à l’épreuve du genre (Tiphaine Samoyault, Nathalie Piégay, Laure Murat)

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Ce qui me frappe dans l’intitulé de notre colloque, c’est la disposition en miroir des syntagmes qui s’inscrivent de part et d’autre des deux points : d’un côté, l’emploi d’une métaphore usée, à valeur personnifiante – « la plume savante » ; de l’autre, le renfort d’une apposition à valeur explicative – « écrivains-chercheurs contemporains ». Le féminin, pour la désignation imagée ; le masculin, pour l’explicitation littérale. Ce qui peut paraître ici anodin découvre en fait un fil réflexif que j’aimerais tirer et qui engage, dès l’analyse du titre, différents biais et jeux d’occultation que je voudrais rappeler avant d’en venir à l’éclairage d’un corpus proprement dit. L’image donc, comme souvent, est au féminin, surtout quand elle réfère à une pratique artistique – en l’occurrence ici l’écriture – dont les figures topiques (les « muses » de l’Antiquité) ont profondément marqué l’imaginaire occidental : on taquine la muse, on manie la plume, on tresse des fleurs de rhétoriques, on cultive les belles lettres, etc. Il faudrait bien sûr creuser le dictionnaire de ces locutions imagées, mais leur degré de figement indique assez bien l’usage mythologique que l’on en fait. On les invoque à loisir tout en comprenant bien qu’elle ne désigne plus grand-chose, que leur référence s’est largement émoussée et que, en quelque sorte, leur innocence nous immunise contre l’esprit de sérieux. À l’inverse, c’est bien au masculin que s’accordent tous les mots composés qui cherchent à établir une désignation rigoureuse d’une notion encore en voie de fixation. Pour nous, il s’agit aujourd’hui des « écrivains-chercheurs », mais plus largement, dans la liste des publications récentes sur un sujet voisin, on retrouve des « écrivains-critiques » (Gauvin, 1997), ou son symétrique, le « critique-écrivain » (Stiénon, Absalyamova et van Nuijs, 2019), mais encore de façon plus lâche la catégorie bifrons de « l’écrivain-professeur », que Charles Coustille pense comme une figure d’avenir du champ universitaire, à la fois comme réalité sociologique et comme motif fictionnel (Coustille, 2012, 2018). L’examen, même rapide, de ces différents travaux souligne un effet redoublé de masculinité : comme si l’expansion de ce motif titre – écrivain-critique / écrivain-professeur – appelait en retour une exemplification presque essentiellement masculine : Baudelaire, Mallarmé, Péguy, Céline, Paulhan, Blanchot, Sartre, Barthes, Doubrovsky, Lodge, Forest, Pachet, Bayard, Bergounioux. Rares (très rares

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